Théâtre
LA FONTAINE (au public) "Merci d’être venus jusqu’à chez moi pour m’accompagner dans mes derniers instants. Pardon de m’adresser à vous dans cette langue vulgaire, j’aurais mille fois préféré vous parler dans la noble poésie si chère à mon coeur mais vous me trouvez ici fort diminué par la maladie. Vous l’aurez sans doute aussi remarqué par le négligé de ma tenue. Je vous avais déjà habitué à une perruque mal brossée ou à des bas me tombant sur les chevilles mais avouez que je ne m’étais encore jamais présenté le jour en habit de nuit. Quoique dans un lit ce costume est plutôt de circonstance ! C’est vous qui devriez vous changer ! Pardon, je comprends que vous n’ayez pas le coeur à plaisanter. J’ai jugé opportun de vous faire venir de mon vivant. Je sais qu’il est d’usage de dire « adieu » aux morts une fois le décès établi mais que voulez-vous ? Je n’ai jamais fait comme les autres et ce n’est pas aujourd’hui que je vais changer. En réalité je ne résistais pas à l’envie de vous montrer comme la mort peut être une chose aisée."
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